Elections sénégalaises de 2024 : Comment la société civile et la jeunesse ont protégé la démocratie

Contexte pré-électoral : Menaces sur le paysage démocratique sénégalais

La transition démocratique du Sénégal a connu plusieurs difficultés, notamment des tentatives de modification du calendrier électoral établi. En particulier, le pays a été confronté à des troubles politiques importants, d’abord en 2011, lorsque le président Abdoulaye Wade a tenté d’obtenir un troisième mandat inconstitutionnel, et plus récemment en 2024, sous le mandat du président Macky Sall, qui a tenté de retarder les élections présidentielles, initialement prévues pour le 25 février, perturbant ainsi la longue tradition du pays d’organiser des élections le dernier dimanche de février tous les cinq ans depuis 1963. Depuis 1963, le Sénégal organise traditionnellement les élections présidentielles le dernier dimanche de février tous les cinq ans, ce qui témoigne du respect du pays pour les processus démocratiques.

Cette décision a été prise dans un contexte de tensions politiques croissantes caractérisées par des violations des droits de l’homme, des restrictions de la liberté d’expression et un contrôle accru du gouvernement sur les processus administratifs. Ces actions ont déclenché une série de conflits politiques qui ont duré trois ans, principalement entre le parti au pouvoir et d’importants groupes d’opposition.

En réponse à ces défis, le président Sall a cherché à promulguer une loi qui reporterait l’élection, violant ainsi les protocoles constitutionnels. Cette tentative a non seulement conduit à l’instabilité nationale, mais a également entraîné une violence généralisée. Le Conseil constitutionnel, chargé de contrôler la légalité des processus électoraux, est intervenu en rejetant le report et en annulant le décret présidentiel. Cette décision a joué un rôle crucial dans les tentatives de rétablissement des normes démocratiques au Sénégal, bien qu’elle n’ait pas pu empêcher d’autres retards électoraux et d’autres manifestations publiques.

Tensions préélectorales : Manifestations, violence et répression

L’élection présidentielle sénégalaise de 2024 s’est déroulée dans l’agitation et l’instabilité. Tout au long de l’année 2023 et au début de l’année 2024, le pays a été le théâtre de graves manifestations contre l’administration du président Macky Sall, qui ont fait de nombreux morts. Les manifestations ont été le résultat d’un mécontentement généralisé face aux menaces perçues contre les principes démocratiques, ce qui a conduit à des affrontements avec les forces de l’ordre, au cours desquels des milliers de jeunes manifestants ont été arrêtés et auraient été maltraités par les forces de police et de gendarmerie.

La réponse du gouvernement à la dissidence a été sévère, les dirigeants de l’opposition ayant été démis de leurs fonctions par la force lorsqu’ils tentaient de mobiliser le soutien ou de protester contre l’administration. La répression s’est étendue aux médias, de nombreux journalistes et commentateurs politiques ayant été arrêtés pour avoir exprimé leurs critiques à l’égard du gouvernement. En outre, les autorités ont révoqué les licences de deux chaînes de télévision, restreignant encore davantage la liberté de la presse dans le pays. Cette période de répression politique et de violence a eu un impact profond sur la réputation du Sénégal en tant que bastion de la démocratie en Afrique de l’Ouest. En fin de compte, le Conseil constitutionnel a confirmé le calendrier des élections, allant de l’avant avec une liste de candidats approuvés, y compris un candidat libéré de prison quelques jours avant l’élection, afin de maintenir l’intégrité démocratique au Sénégal.

L’originalité de la démocratie sénégalaise

Le Sénégal fait figure de phare de la démocratie en Afrique de l’Ouest, une région souvent troublée par des coups d’État militaires. Depuis son accession à l’indépendance en 1960, le Sénégal a cultivé une solide réputation démocratique. La résilience de sa démocratie se reflète dans la solidité de ses institutions, la prolifération des partis politiques, la promulgation de lois sur la parité hommes-femmes et la participation active de la société civile et des médias. Ces piliers démocratiques ont facilité l’élection ordonnée de cinq présidents de 1963 à 2024, l’élection de 13 législatures à l’Assemblée nationale et la séparation effective des pouvoirs. Le Sénégal continue de renforcer ses références démocratiques et s’efforce de servir de modèle de démocratie en Afrique de l’Ouest, en renforçant constamment son rôle de vitrine de la gouvernance démocratique dans la région.

Le rôle de BudgIT Sénégal et d’autres acteurs dans la sauvegarde de la démocratie au Sénégal

 

BudgIT Sénégal a considérablement accru la participation des citoyens à la gouvernance afin de promouvoir la responsabilité fiscale publique et de sensibiliser aux menaces démocratiques par le biais de médias tels que West Africa Democracy et BBC News. BudgIT Sénégal est un membre fondateur de « AAR SUNU ELECTION » (préserver notre élection), une coalition de plus de 30 organisations de la société civile – cet effort de plaidoyer mené par la coalition pour protéger les principes démocratiques au Sénégal avant et après les élections générales de 2024. Elle fait pression sur l’administration du Président Sall pour qu’elle respecte le calendrier républicain et organise les élections au moment opportun. AAR SUNU ELECTION » a pris plusieurs mesures, telles que l’envoi d’une lettre publique au président, l’organisation de la “Grande marche du million de Dakar”, l’engagement auprès des médias et la conduite de campagnes de sensibilisation aux niveaux local, national et international. Ils ont collectivement surveillé le processus électoral afin d’en garantir la transparence et l’équité. Leur engagement continu souligne le rôle vital des OSC dans la promotion d’une société démocratique et résiliente.

Les événements de 2024 soulignent l’importance d’une société civile forte pour préserver la démocratie. Ces organisations ne défendent pas seulement la démocratie et la bonne gouvernance, mais contribuent également de manière significative au développement durable, à la transition énergétique, à la justice climatique, à l’égalité des sexes et à la responsabilisation en matière de santé. Le soutien public à ces acteurs vitaux est crucial pour une gouvernance démocratique réussie au Sénégal.

Amadou Samb est le responsable national de BudgIT Sénégal.

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